Sunday 8 October 2017

Valeria

Comment désorbaniser Buda-Pest pour remonter à son origine fondatrice, le 'chez nous' local tant vanté du nationaliste? Pas besoin de populisme pour cela, un petit-grand voyage espace-temps suffit. Le petit espace d'abord, avec le Danube pour trait d'union: on se débarrasse du fléau tout plat à droite, pour ne garder que la divinité en relief à gauche. Le contraste relief-plat est très visible depuis le pont sur le grand fleuve, avec le centre historique sur la colline Buda à gauche, et les platitudes plus populistes de droite. Puis, Pest éradiqué, et comme il en faut pour tous les goûts, on dédaigne ce Buda encore trop jeune, pour se tartiner du Buda vieux par le HEV ligne 5, destination Obuda (Old Buda); le HEV est l'équivalent magyar du RER.

Grand temps de quitter ce petit voyage dans l'espace pour un grand dans le temps, une remontée jusqu'à la fin de l'Anquité (la chute de l'empire Romain, sous les coups de boutoir des Huns et des autres). Et hop, cette remontée fulgurante dans le temps nous transforme Obuda en son original antique: Aquincum, capitale de la Valeria. La Valeria était une province romaine de Pannonie, une région qui s'étendait gross-modo entre le Budapest et le Zagreb d'aujourd'hui.  Même pas besoin d'antique machine à remonter le temps, Aquincum est accessible en RER ligne 5, transport moderne de l'espace-temps; en ruines certes (Aquincum, pas le métro), mais tout est relatif dans l'espace-temps.

Géologiquement issue de la mer de Pannonie, disparue il y a quelques millions d'années (piconnaissance utile pour discuter avec les Huns à Buda, moins avec les autres à Bruxelles), très peu est connu sur la Pannonie, jusqu'à sa conquête par Octave, futur empereur. Oui, Octave, le petit fils de Jules, l'auguste restaurateur (romain, pas encore bruxellois) de la monarchie (romaine aussi), celui qui pour devenir Auguste élimina ses compagnons du second triumvirat (un régime triarchique) - un deuxième "Tu quoque fili mi" posthume pour César,  vainqueur lui du premier triumvirat. Mais je ne vais pas vous Pomper sur César.

Trois siècles passent jusqu'à ce que Dioclétien, un lointain successeur monarchique du petit fils de Jules, passe d'un régime amincissant à un régime grossissant, en nommant d'abord un co-empereur, et puis deux Césars dans la foulée, pour former la tétrarchie romaine. Régimes mono, trio, et tetra - manque le duo de têtes:  la diarchie, patience. Pour les impatients, c'est comme Macron à Andorre.

Dioclétien, un Dalmatien de famille modeste, abdiqua volontairement (le premier à Rome, avant Benoît XVI). Avant de prendre pension complète dans son palais (devenu depuis la ville de Split, toujours une villégiature de nos jours), ce Dalmatien  - qui, si on compte bien, était sans Huns - divisa la Pannonie en quatre provinces.  Parmi elles, la Valeria, qui englobe Aquincum/Obuda, province nommée (et non point baptisée) en l'honneur de la fille de Dioclétien: Galeria Valeria.

Mariée de raison avec son Jules, le César Galère de la tétrarchie paternelle, Galeria Valeria n'eut pas une vie artistique, trop mal encadrée peut-être. Valeureuse de naissance mais condamnée par l'inévitable guerre civile entre quatre têtes, elle rama beaucoup et finit corps sans bien en mer (allusion anachronique de mille ans aux condamnations à 20 ans de rythmes enchaînés rames-tambour). Mais pas d'anxiété etymologique pour toutes les valeureuses Valérie du monde: la province de Valeria a donné son nom à la valériane, alternative naturelle aux somnifières et autres anxiolyques chimiques. Une belle fleur.

Peu enclins aux somnifères (ils conduisaient avec beaucoup de chevaux, souvent et loin), les Huns finirent par prendre la place des autres en Valeria, avec leurs flèches et un régime politique original: une diarchie récurrente. Attila co-roi des Huns soignera cette diarchie récurrente qui l'accable en trucidant son collègue pour une plus auguste monarchie. Et c'est à Aquincum en province de Valeria, au vieux Buda, qu'Attila, ce migrant combatif infatigable, installa son quartier général. Budapest, comme aujourd'hui, pays des uns et des autres.

No comments:

Post a Comment

Trois c'est trop

Si Ricard est la crème de la pastisserie amère, ce n'est pas grâce à feu Charles Pasqua, la "Mère Teresa du RPR" (dixit de son...