Monday 24 August 2020

Trois c'est trop

Si Ricard est la crème de la pastisserie amère, ce n'est pas grâce à feu Charles Pasqua, la "Mère Teresa du RPR" (dixit de son bien vivant). Bien avant de se recaser en premier flic de France, le directeur commercial du premier vrai Pastis de France est tombé en carafe (expression de circonstance); Pasqua écarté de Ricard sur dossier des flics de France pour avoir fripouillé fric avec un amer pas français. Si si, le Pasqua Pastis des futures lois Pasqua du bon Français a fripouillé pour importer un amer étranger!  

Finalement, le pastis comme le fric, ç'est une question de dosage à l'arrosage - une question d'eaux troubles en somme. Pour les curieux, l'amer américano copain de Charles était Gancia. Infidèle au verre jaune régional (couleur régionaliste de l'homophone au rosé de Camargue), le futur bleu populiste était donc fana du rouge. Trêve d'amers bavardages haut en couleurs d'un café de Canebière, reconcentrons-nous sur l'amer apéro, le vrai (et bon) français. Il était une fois.. un Pernod avant Ricard. Oups, pardon, l'histoire commence avec deux Pernod sans Ricard. Servons autant qu'il se doit, dixit Fernandel: "le pastis, c'est comme les seins: un c'est pas assez, et trois, c'est trop.

On s'éloigne de Mère Teresa. Restons sains et sobres - deux Pernod svp! Deux Pernod avec d", pas comme dans Dupond/Dupont, ni comme dans flamand/flamant (jaune/rose). Quoiqu'existe toujours l'anisé Vieux Pontarlier Pernot avec "t", mais ne diluons pas trop la chose - ça troublerait. Restons ordonnés ("pastis" signifie "désordre" en occitan) et débutons avec les deux absinthes Pernod. Absinthes... eh oui, pas encore de pastis au 19ème, c'était avant le réchauffement climatique.

Il était une fois... un Mr Pernod suisse à Pontarlier, et il était une fois un Mr Pernod pas suisse et pas parent de l'autre, à Avignon, en Provence. Avec son usine "Pernod fils", le Suisse fit de Pontarlier en Jura la capitale de l'absinthe.  Point commun entre l'absinthe et le pastis? Pointons la ténacité face à la dilution: la vidange des cuves d'absinthe dans le Doubs à Pontarlier (pour une bonne raison non-écologique) a peut-être rendu des poissons clown, mais l'absinthe-à-l'eau a surtout teinté de couleur écolo une autre rivière, la Loue, preuve géoalcologique que sa pittoresque source n'est qu'une résurgence du Doubs.

Après avoir pointé, il faut tirer l'histoire. Confinée d'abord en bourgeoisie, la "fée verte des boulevards" (ah...ça sonne soif) se propagea  d'abord au retour de guerre (zone rouge) des soldats porteurs d'absinthe. Selon le petit livre vert-pas-écolo du soldat en Algérie au 19ème, il fallait diluer quelques gouttes d'absinthe contre malaria et dysentrie (note pour les confinés concernés: c'est permis, l'absinthe est redevenue zone verte, ça a encore changé). 

Mais comme pour le bio, la vraie démocratisation de l'absinthe survint grâce aux volumes industriels. Le Pernod pas suisse, l'autre, celui d'Avignon, lança sa marque d'absinthe "Jules Pernod" fin 19ème en profitant éhontément de l'homonymie avec la déjà historique absinthe de "Pernod fils" à Pontarlier. Plus tard, l'arriviste-copiste de la cité des papes rebaptisa même son usine "Pernod père et fils" au grand dam du Pernod de Pontarlier(*). Ce dernier, le premier Pernod, monta au pont, protesta, esta, etcaetera, mais point de Peuchère au vocabulaire du copiste Pernod, qui continua à faire danser Avignon tout rond.

Mais rendons à Marius ce qui appartient à la Provence. Lorsque la loi (1915) força l'abstinence d'absinthe (ça sonne encore plus soif ces mots semblables), désolant Pontarlier,  Pernod de Provence créa "Anis Pernod". Moins alcoolisée, la nouveauté à base de badiane n'atteignit pas la popularité de l'absinthe - moins c'est fort, moins c'est populaire, devise bien connue des populistes. Et... le Pernod de Pontarlier répliqua avec "Anis Pernod fils". Peuchère! Ca esta etcaetera de nouveau, jusqu'à fusion des deux Pernod (1928),  la fusion des deux avec "d", une construction comme un pont d'Avignon à Pontarlier. Et un Pernod garçon, un!  

Vivre avec un seul Pernod? Euh,.. en repensant à Fernandel, est-ce là un sobre dessein? Ouf, un autre luron pointa en surface pour materner l'assoiffé d'une nouvelle nouveauté: le "pastis de Marseille" (1932). Un certain Ricard, Paul, mécène des sports qui roulent (formule 1, pétanque), mécène ailleurs aussi (Bombard, corrida, ..), et fin visionnaire en marketing. Question finesse, le choix de Charles s'avéra moins fin in fine; les chameaux chargés de Ricard jusqu'à Paris, la "caravane de la soif", on peut discuter.

Ricard, c'est la première apparition du mot "pastis" sur une bouteille, avec plus de réglisse que dans "Anis Pernod". On me dit que la réglisse stimule le cerveau, ça me va.  Bien entendu, un peu amère mais fidèle à sa tradition copiste, la maison Pernod a réagi, récolté plus de réglisse, et commercialisé aussi son "vrai pastis". En mille neuf-cent cinquante et un, qui l'eût deviné?  

Et Fernandel dans tout ça? "Pernod" et "Ricard" ont fusionné en 1975. Un seul c'est trop peu, ça manque de relief comme il disait. Bah, faites comme Serge Gainsbourg: commandez un "102" !

(*) Rébus sur l'adjectif associé: mon premier est demi à Avignon, mon second c'est toi en Wallon, mon troisième qualifie un prêtre du Dieu Mars. Et mon tout est un Jurassien de Pontarlier.

(c) surtout Wikipedia.


Trois c'est trop

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