Tuesday 12 September 2017

Jacques a dit

A l'armée, on s'exécute quand le chef a dit. En temps de guerre, on exécute même qui ne s'exécute pas. En quelque sorte, le verbe transitif est plus intransigeant, assassin même, que son pronominal réfléchi, quoique, à bien y réfléchir, moins meurtrier que son pronominal réciproque. Pensez à ceux qui se sont exécutés en duel pour une histoire de coeur ou de cul - même pas un match nul comme  en sport, ni vainqueurs ni vaincus, juste un match vain, que deux vains culs par terre.

En nombres inversés aussi: vingt-deux par terre, en cas de trucides réciproques au couteau. Vingt-deux, synonyme de couteau pour les arsouilles du XIXeme, à cause de la longueur de la lame dudit "couteau d'arsouille". L'arsouille est un vrai voyou de bas étage - la gentille interprêtation d'enfant espiègle n'est qu'un exemple typique de belgicisme. Le vingt-deux est donc une arme, à l'origine (contestée) du célèbre appel aux armes "Vingt-deux, v'la les flics".

Appel aux armes. L'armée. En temps de guerre, le peloton d'exécution est un peloton d'exécutants du solitaire qui a refusé de s'éxécuter. Paradoxalement en entreprise, c'est plutôt l'éxécutant qui se retrouve seul à exécuter ce qu'a dit le peloton d'éxécutifs. Pour comprendre le rôle de l'exécutif, il suffit de se pencher sur le suffixe. Le "if" est un suffixe adverbial qui indique le pouvoir de déclencher l'action représentée par le verbe: c'est clair, le comité éxécutif a le pouvoir de déclencher l'exécution. Si c'est pas clair, pensez à purgatif.

Au pays des arsouilles, en enfance belge, la chaîne de commandement est plus simple, sans comité éxécutif, une approche militaire, avec 'le' chef. Un seul chef de jeu:  on exécute ce que "Jacques a dit". Notons au passage l'approche pédagogique du Québec, où ce jeu d'exécution enfantin se complémente d'un exercice d'articulation digne des cailloux de Démosthène: on n'y joue pas à "Jacques a dit" mais à "Jean-Guy dit" (allez-y, articulez ving-deux fois de plus en plus vite, ça muscle les zygomatiques). Le grand voisin du Québec a réactualisé le jeu, en éructant ses ordres (reconnaissons là un sourci partagé pour l'articulation), comme des noms d'oiseaux, en 140 caractères: si Donald a dit, surtout ne pas exécuter.

A l'autre extrême de la planète, loin des habitudes de Donald, Jacques ne dit pas, mais Jacque se mange: la pomme de Jacque est le fruit national du Bangladesh, pomme hélàs nommée aussi 'fruit du pauvre', riche en fibres, consommée sous diverses formes en Asie du Sud-Est, même avec du lard fumé à La Réunion (le 'ti jaque boucané'). Le Jacquier produit aussi un latex, connu aussi comme "colle jacque', latex utilisé pour piéger les oiseaux. Que Twitter fasse gaffe au Bangladesh.

Ayant vaincu un rhinocéros au latex en début de carrière, Tintin aurait donc pu se faciliter la fin de carrière aussi, en restant sur le latex pour attraper la pie voleuse de bijoux. Inspiré par son vulgaire nom, la jaquette, on dit de la pie qu'elle jacasse. Il n'y a pas que la pie qui jacasse. Son pas-du-tout cousin, très éloigné physiquement, le chameau, jacasse aussi. Si si! Jacques vous a peut-être dit que le chameau blatère, mais ce nom vient du latin 'blaterare' - jacasser en français, babbelen en néerlandais. Le bélier blatère aussi d'ailleurs, la chamelle blatère, la bélière non - à croire que certaines femelles ne jacassent pas.

Quand la jacasse est négative (voire misogyne, hem), en d'autres mots si Jacques le babelaar parle de vous comme un chameau, on ajoute tout simplement un préfixe négatif, en disant de Jacques qu'il..dé-blatère.

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